En amont de la révélation du palmarès de la 52 e compétition du Club des Directeurs Artistiques le lundi 12 juillet, Packshotmag en partenariat avec le Club publiera tout au long de la semaine les interviews des présidents et présidentes des différents jurys du Pôle Production, notamment des catégories Craft Film Pub, Clip, Films Mode et Animation & VFX. Arno Moria, responsable du Pôle Production, conclura le 9 juillet cette série d’interviews par la révélation des shortlists du Pôle.

À 4 jours du palmarès et à la veille de la publication des shortlists, Franck Lambertz, directeur de création, superviseur VFX Mikros MPC , président de la catégorie Animation& VFX fait le point sur les qualités et les tendances émergentes des créations dans cette catégorie.

 

Votre jury, votre palmarès

Une journée hallucinante ! C’est une grande fierté de faire partie d’un jury. Les échanges sur notre spécialité et la confrontation à différents points de vue – réalisateurs, créatifs d’agences, etc – sont toujours des moments très enrichissants qui permettent de prendre du recul sur son travail quotidien. S’est ajoutée pour moi cette année, la responsabilité d’être Président. Cela oblige à beaucoup d’humilité par rapport à son propre travail d’être dans le rôle de celui qui doit établir un classement. C’est une mission passionnante et difficile, notamment cette année au vu de la qualité des travaux en compétition. Après une année Covid, on ne savait pas ce que cela donnerait. Et malgré tout on a une production riche. C’est beau et diversifié.

On voit la qualité et la variété du marché français avec des pièces à gros VFX, des effets très lourds craftés d’une manière hallucinante comme le travail d’Unit pour UBISOFT. À l’opposé, on a des réalisations où l’on sent l’animation plus traditionnelle avec un artiste qui peut travailler seul, comme les productions de Jungler.

Nous avons aussi eu un travail à la frontière du motion design avec le clip de Sébastien Tellier. Sans oublier ce petit bijou inclassable, ce film de nouveau talent qui affiche déjà une maturité digne d’un professionnel confirmé.

Nous avons aussi jugé des travaux qui montrent comment la réalisation technique n’est pas une fin en soi. La maitrise de réalisation, la beauté du graphisme, le choix des couleurs, de la composition sont au service du propos tout en gardant une image forte qui a beaucoup de choses à raconter. La question est de comprendre quel ressenti un spectateur doit avoir en regardant le résultat final.

J’apprécie la richesse de style et d’écriture des Français, toujours au service d’un propos. L’histoire prime avant tout. Par rapport à l’approche anglo-saxonne où l’on privilégie parfois la forme sur le fond et où c’est toujours la grosse industrie qui se met en ligne au service d’un effet. Alors que c’est l’histoire qui doit primer et les effets ne sont présents que pour la servir.

Dans les métiers techniques, ça peut être compliqué mais il faut toujours rester frais et créatif et trouver comment adapter, devant une machine, un propos ambitieux dans une réalité physique.

De l’artisanat à la grosse industrie, le jury VFX & Animation va avoir à juger le travail d’une personne, d’une micro-équipe autour d’un talent de dessin jusqu’à des niveaux industriels. L’écart est beaucoup plus grand que dans d’autres jurys.

Ce jury récompense aux deux extrémités, montrant qu’il y a tous ces talents en France, d’une passion considérable à des moyens considérables. C’est intéressant que cette catégorie puisse englober tout ça. Mais cela rend d’autant plus difficile l’élaboration d’un classement pour des choses aussi respectables, enrichissantes, et qui se nourrissent l’une de l’autre.

 

Une tendance ?

Pour l’animation et VFX, la tendance est toujours la même : englober la modestie artisanale à l’énorme industriel, en veillant à ce que l’un n’écrase pas l’autre.

 

Un conseil aux jeunes qui voudraient se lancer ?

J’aimerais saluer la qualité des écoles françaises, leur richesse et leur diversité. Certaines sont plus tournées vers l’art et privilégient l’idée et la personnalité des individus. D’autres offrent des profils davantage prêts à démarrer leur carrière. Si je devais donner un conseil aux jeunes, c’est « choisissez bien votre école selon les projets sur lesquels vous aimeriez travailler ».

 

Art & Commerce, la contrainte du travail de commande sur la VFX

Pour ce qui est de la contrainte, ce que j’aime, c’est adapter ce que je crois être la bonne image à la vision de quelqu’un d’autre. Mais cette image n’est pas la mienne : c’est celle d’un réalisateur, d’une agence, d’un client. Il faut être sûr de ce que l’on pense.

Quand je travaille avec des réalisateurs et des artistes qui se retrouvent enfermés dans un style, ils ont du mal à se renouveler. Dans la VFX, chaque production est totalement différente et d’une production à l’autre, on doit être capable de défendre des points de vue totalement opposés. Mais dans cet opposé, il faut trouver ce que l’on pense, le pousser de manière dynamique, sans se « prostituer ». En y croyant et en l’adaptant.

 

Pour l’aspect Art & Commerce, ce qui est développé grâce au savoir-faire en animation 3D et VFX dans le domaine du commerce rejaillit naturellement dans des domaines plus artistiques. Le quotidien est bombardé d’art commercial et tant mieux, ça reste de l’art !